18 octobre 2025
Dans les années 1850-1900, la France affirme sa suprématie dans un domaine qui conjugue fièrement excellence technique et hardiesse expressive. Trois noms s’imposent, dont la trajectoire se révèle en filigrane dans celle de Roty.
La médaille française sort alors de la seule glorification officielle pour devenir champ d’expérimentations personnelles, souvent poétiques, qui font école dans toute l’Europe, jusqu’à la Monnaie de Vienne ou Birmingham.
C’est sans doute la figure la plus omniprésente dans le parcours de Roty. Chaplain, Prix de Rome en 1863, entame une carrière fulgurante : il reçoit la commande de la médaille officielle de la République, le portrait de Sadi Carnot ou encore de multiples portraits de l’élite politique et artistique de son temps. Il contribue à faire de la médaille un art moderne, à l’opposé des simples transcriptions numismatiques du passé.
Quelques éléments majeurs qui soulignent son influence sur Roty :
Une anecdote raconte que lors du Salon de 1882, Chaplain, admirant la médaille de Roty sur le Centenaire de Rousseau, aurait déclaré : « Voilà un style qui parle à l’âme, sans rien renier de l’exigence de la forme » (source : Journal des Artistes, 1882).
Moins connu du grand public, Daniel-Dupuis demeure un orfèvre du modelé et de la composition. Lauréat du Grand Prix de Rome en 1865, il évolue comme Roty dans les cercles de la Monnaie de Paris et du Salon des artistes français.
L’influence est double : elle tient autant de la technique que de la logique de narration silencieuse au revers des médailles. Daniel-Dupuis disparaît tragiquement en 1899, mais laisse à l’art de la médaille une veine poétique dont Roty sera le continuateur.
Le grand-père spirituel de la médaille moderne demeure Pierre-Jean David, dit David d’Angers (1788-1856). Son ombre plane sur tout le XIXe siècle. Dès les années 1830, il bouscule la médaille, jusque-là perçue comme simple miniature monétaire, en la dotant d’un souffle épique.
Une lettre conservée à la BNF atteste de l’admiration portée par Roty à David d’Angers et à son humanisme (BNF, fonds Roty).
Plus discret, Gustave Bianchi (1842-1904) trace pourtant un sillon original, entre classicisme et audace, et croise la route de Roty dès l’atelier Barbedienne.
La Monnaie de Paris demeure au XIXe siècle un lieu stratégique de formation et d’émulation. Roty y sera reçu graveur général en 1888, mais il y croise plusieurs générations de médailleurs. L’atmosphère y est faite de rivalités fécondes et de solidarité.
La transmission s’accompagne parfois d’émulation : lors du Salon de 1887, Roty propose une médaille en hommage à Chaplain, inversant la tradition du maître portraiturant l’élève (Source : Bulletin de la Société des Amis de la Médaille Française, n°13, 1908).
Nourri des humanistes, Roty regarde aussi du côté de l’Italie des XVe et XVIe siècles, berceau de la médaille moderne. En particulier, l’art de Pisanello (Antonio di Puccio Pisano, v.1395-1455) exerce sur plusieurs générations de médailleurs une véritable fascination.
Les maîtres médailleurs de Roty ne lui ont pas seulement transmis motifs, compositions ou philosophies. Ils lui lèguent aussi des techniques clés :
Il est fascinant de constater que Roty, nourri de ses maîtres et du patrimoine européen qu’il admire, est lui-même devenu référence pour des générations suivantes. Plusieurs distinctions internationales lui sont rapidement décernées, comme la Légion d’honneur (1887), ou la médaille d’or à l’Exposition Universelle de 1900, qui consacre son style comme le nouvel horizon de la médaille moderne (source : Le Figaro, 15 août 1900).
| Maître | Apport artistique | Transmission à Roty |
|---|---|---|
| Chaplain | Naturalité, relief vibrant, médaille-tableau | Modernisation des portraits et scènes |
| Daniel-Dupuis | Douceur du modelé, paysages, lumière | Aventure de la narration silencieuse |
| David d’Angers | Souffle épique, portrait suggestif | Dynamisme du geste et du revers |
| Pisanello | Portraits de la Renaissance italienne | Profil stylisé, fond poétique |
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